I Saw the TV Glow

Note d’intention queer size
Owen, un adolescent qui tente de survivre en banlieue, voit sa vie chamboulée quand une camarade de classe lui fait découvrir une mystérieuse émission de télévision de fin de soirée qui dépeint une vision d'un monde surnaturel tout juste sous le leur. Dans la pâle lueur de la télévision, la perception de la réalité d'Owen commence à se fissurer.
source synopsis et images : A24 Fruit Tree Smudge Films Hypnic Jerk Access Entertainment
Fiche créée le 5 septembre 2024 et mise à jour le 5 septembre 2024

Des choses gentilles à dire sur ce film

Plein de belles idées, plein de chouettes fragments, plein de choses à voir et à ressentir... I Saw the TV Glow est riche. Parfois même trop. Au point de rendre brouillon et cacophonique un film qui, travaillé, construit et articulé essentiellement autour d’une thématique, sait pourtant où il va. Pire, ce déséquilibre semble accentuer le gros problème de rythme dont il souffre. Et c’est dommage parce que Jane Schoenbrun qui mêle ersatz de quête initiatique, culture populaire (et rapport à la culture populaire) et légendes urbaines pour aborder la question de la transidentité, réussit autant à être subtile que terriblement évocatrice.
I Saw the TV Glow ou comment Owen (Justice Smith) et Maddy (Brigette Lundy-Paine), deux ados séparés de quelques années mais rapprochés par leur passion commune pour une série télé, se rendent compte que quelque chose cloche dans leur vie à mesure que les repères entre imaginaire et réalité se mettent à danser le quadrille, est un récit à plusieurs strates, qu’on explore niveau par niveau, un peu comme un donjon. Il y a d’abord cette histoire d’amitié toute simple, comme ça se fait parfois, entre deux personnes qui n’ont d’autre point commun que de ne pas être à leur place ; il y a Pink Opaque, ce programme qui les unit, captivant, magnétique, magique... voire presque fantôme comme le serait un Candle cove ; il y a le brouillage des pistes entre l’illusion et la réalité, ce qui est et ce qui semble être, avec la possibilité pour les protagonistes d’être les personnages mêmes de la fiction emprisonnés par leur ennemi dans un corps et une vie qui ne sont pas les leurs (un châtiment presque mythologique) ; et puis au cœur de tout ça, il y a, donc, la transidentité.
Par le biais de la culture populaire et notamment de la série télévisée, Schoenbrun file la métaphore avec délicatesse. Par degrés de lecture. Par paliers. En premier lieu, il y a quelque chose qui à défaut d’être universel, parle à toute une génération, la question au-delà de l’engouement populaire, de l’influence que peuvent avoir certaines séries sur la construction de l’individu, sur sa vie à plus ou moins long terme : identification à des personnages, alter ego, projections, espoirs, construction de souvenirs parfois partagés comme c’est le cas d’Owen et de Maddy... C’est un peu un langage commun, qui va rapprocher les spectateurs et spectatrices des personnages.
Et c’est un langage commun dont fait partie aussi la désillusion. Celle-ci on la trouve d’abord dans les propos de Maddy qui des années après avoir quitté leur ville, retrouve Owen et lui confie : Time wasn’t right. It was moving too fast. And then I was 19. And then I was 20. I felt like one of those dolls asleep in the supermarket. Stuffed. And then I was 21. Like chapters skipped over on a DVD. I told myself, « This isn’t normal. This isn’t normal. This isn’t how life is supposed to feel. » Ce sentiment-là, on le connaît toutes et tous plus ou moins. A ceci près que pour certains, il est question de ne pas être celui ou celle qu’on aurait pu ou voulu être et pour d’autres de ne pas pouvoir être celui qu’on est. Et ça fait une différence.
I Saw the TV Glow, c’est donc surtout l’histoire d’une femme coincée dans un corps d’homme. De ce point de vue, prendre la série télé comme point de départ présente aussi l’intérêt d’aborder la figure du personnage, la question du rôle, et de la perte de soi. Maddy sait quelle est sa vraie nature, elle est Isabel, l’une des deux héroïnes de Pink Opale, sa lucidité va même au-delà puisqu’elle est consciente de vivre au fil des saisons et qu’elle ne doit pas tant vaincre Mr Melancoly leur ennemi juré, qu’arriver à la saison 6, tandis que Owen, sur qui la narration est axée, doute. Elle a fini par partir. Lui est resté.
Et avec le temps, le doute s’est fait déni. Owen est Tara, l’autre héroïne, condamnée elle aussi par Mr Melancoly à l’enfouissement, l’amnésie, l’illusion, les apparences... le placard. Le final est d’autant plus dramatique que si Mr Melancoly a bien prononcé la peine, c’est quelque part Tara/Owen qui se l’applique en rejetant Maddy/Isabel pour rester dans la matrice, jusqu’à le réaliser puis craquer complètement dans l’indifférence générale.
À ce fond assez dense répond une forme très soignée. Maaaaaais d’un soin à double tranchant. Narrativement et visuellement parlant, c’est malheureusement parfois trop arty dans le sens négatif du terme : le film est en effet marqué par une esthétique indépendante normée très Sundanço-Southbysouthwesto-compatible raccord avec une bande son très faussement indépendante et un peu chiante qui tient vraiment de la pub pour cahiers oxford pour adolescents rebelles et créatifs. Pas de quoi bouder pour autant les petites réussites que sont les extraits de Pink opaque, la série que suivent les personnages principaux, mélange intrigant entre Buffy, Power Rangers et Eerie Indiana. Leur rendu est crédible, en terme de photo, d’accessoires, de découpage, de typographie des crédits, on est devant une série télé des années 1990... et c’est le principal puisque la série tient un rôle fondamental dans le récit.
Les incursions de Pink Opaque dans le récit principal, sous forme de souvenirs, de réminiscences, sont de la même manière très réussies, avec quelques saillies inquiétantes dont Marco et Polo, les lieutenants de l’antagoniste Mr Mélancoly, une version négative de la lune de Mighty Boosh, interprétés par les (entre autres) danseuses Emma Portner et Madaline Riley, ainsi que le Mr Melancoly susnommé qui se fait particulièrement glauque passé un degré de réalité.
Au final, I Saw the TV Glow est un beau film ou plutôt une belle tentative. Il y a un propos, il y a de la personnalité, il y a de l’originalité mais aussi une esthétique inégale, entre un côté Pink opaque très réussi et un côté indé publicitaire moins séduisant, et aussi un cruel manque de rythme, avec des longueurs assez inutiles, des ellipses qui peuvent être pertinentes mais qui cassent la dynamique globale, qui empêche de se faire happer pleinement par le film.

Je mets un 7 parce que j’ai passé effectivement un bon moment et que surtout I Saw the TV Glow m’a bien nourri aussi après le visionnage... mais j’aurais aussi pu mettre un 6 parce que malgré la richesse de ce qui est proposé, bin je me suis quand même un tout petit peu fait chier par moments.



Arf... Ce film n'est pas assez riche en ingrédients pour jouer dans de bonnes conditions avec une grille de 36 cases...


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Scénario > Contexte spatio-temporel

Scénario > Élément

Thème > N’importe quoi

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