1943. L'armée allemande, démoralisée, perd de sa superbe sur le front russe. Le colonel Brandt reçoit un nouveau chef de bataillon, le capitaine Stransky, un aristocrate prussien, orgueilleux et opportuniste. Celui-ci s'est engagé dans le seul but de décrocher la Croix de fer. L'ambition de Stransky se heurte rapidement à la rigueur du sergent Steiner, un sous-officier très estimé de ses hommes. De retour d'une bataille, Stransky rédige un rapport fallacieux, tout à son honneur, que Steiner refuse de contresigner. Steiner repart en première ligne. Stransky omet de lui faire parvenir l'ordre de repli du colonel Brandt. Steiner et ses hommes se retrouvent cernés par l'ennemi...
On est souvent pris en défaut par des résumés de deux lignes qui annoncent le meilleur, par un imaginaire qui se projette dès le titre, par des critiques qui vantent monts et merveilles. On croît qu’on va assister à la fin du monde, on ne verra que trois californiens se marcher dessus, on fantasme sur des requins tueurs, on aura 50 minutes de discussion de couloirs... Avec Dagon, non. Avec Dagon, on peut se dire le sourire aux lèvres : « C’était exactement ce que j’avais envie de voir. »
Faut dire qu’avec une adaptation de Lovecraft par Gordon, on ne prenait pas de gros risque. Stuart Gordon a largement fait ses preuves, s’appropriant le matériaux de base avec succès, sachant matérialiser une horreur sensée ne jamais se montrer et l’habillant parfois d’une pointe de grotesque ou d’humour noir. À titre d’exemple, le héros, Paul Marsh (Ezra Godden), se barricade dans sa chambre d’hôtel en vissant sur la porte qui n’en porte pas, le verrou des chiottes. La manœuvre est stupide, il perd du temps et son bricolage ne le protégera pas mais la scène est tout sauf ridicule, elle accentue une tension jusque-là latente : les villageois se font plus menaçants qu’inquiétants et notre héros, un peu con con et seulement équipé d’un canif, est sacrément mal barré.
L’ambiance est aussi un gros point fort, on ressentirait presque le froid, les embruns, l’odeur de pourriture que charrierait la mer ; tout dégouline, les personnages ruissellent, s’embourbent, les villageois dégénèrent, se liquéfient. Les villageois sont particulièrement bien foutus, grâce à des maquillages et des bruitages plutôt réussis (de quoi faire oublier les effets numériques bien moches). Sans oublier des scènes gores, un téléphone portable qui fait office de matraque, des peaux humaines mises à sécher, des décors de chapelle pervertie, etc. Toute une ambiance et des éléments qui ne sont pas sans rappeler le jeu vidéo Résident Evil 4 qui sortira quelques années après.
Petit bonus, il y a des hommes torches. Beaucoup.
Arf... Ce film n'est pas assez riche en ingrédients pour jouer dans de bonnes conditions avec une grille de 36 cases...